Rentrez-donc !

Nul n'échappe à la Rentrée, pas même votre servante qui pourtant, de par son statut de Retraitée Touche-à-Tout (RTT), n'aurait a priori pas accès à la Rentrée puisqu'elle n'a pas effectué de Sortie.

C'est ainsi que je reprends le chemin de mes billets blogueurs.

Vous l'aurez constaté, les premiers à Rentrer sont les éditeurs et leurs poissons-pilote les critiques littéraires, qui, dès la mi-août, sonnent la cloche et chauffent le biceps pour le long baston des prix littéraires.

Ces dernières années la rentrée littéraire se faisait sous le signe de la Pléthore : " Plus de 700 nouveaux romans sur la table de vos libraires, comment choisir ? " titraient les articles et les émissions de la Rentrée. A tous les coups je me faisais appâter, dans le vain espoir de tomber sur un bon plan d'orientation dans la jungle des livres. Cette année, coup de cymbale, les media claironnent : " Une rentrée littéraire sous le signe du Peu ", " cinquante nouveaux livres de moins que l'an passé "  ( il en "reste" tout de même 654!), mais qu'à cela ne tienne, la pseudo disette littéraire crée du bavardage médiatique, le monde tourne de travers, rien à signaler.

Et pourtant, la pénurie en littérature existe bel et bien ! Mais elle n'est pas dans le nombre d'ouvrages publiés, elle est dans la poignée de titres qui monopolisent toute la critique littéraire en cette Rentrée. Admirable consensus ! D'un journal à l'autre, d'une émission à l'autre, les mêmes noms d'auteurs reviennent en boucle, une vingtaine ( Franzen-Grossman-Murakami-Auster-Reinhardt-Williams-Carrère-Foenkinos-Beigbeder-Jenni-Oster-Ovaldé-de Vigan-Darrieussecq-Nothomb-Schneider-Dantzig-Salvayre-Sillig et quelques autres..) Et les 600 autres romans, qui ont trouvé, ô merveille, grâce auprès d'un éditeur, faut-il en faire des confettis pour Carnaval ?

D'où vient-elle cette "short list" qui, d'ailleurs, se retrouve telle quelle sur les tables des libraires, comme s'il s'agissait de l'ordre naturel des choses ? Notez que la qualité des livres n'est pas en cause a priori, je me réjouis même d'en lire plusieurs. Le hic, c'est l'unanimité mediatique et commerciale, le mimétisme en vase clos qui, comme par hasard, garantit à tous les grands éditeurs les belles parts du gâteau des ventes.

Ainsi va la Rentrée littéraire, exercice de calibrage au milli-poil, balisage d'enclos et plantage de piquets : "c'est là-dedans que ça se passe Messieurs-Dames, faites confiance aux experts, rien que de la graine de prix ! ".

Pour la dissidence, les surprises et les prises de risque, il faudra attendre une plus calme saison. Je me console en pensant à Paul Harding qui a patienté 10 ans avant de trouver un petit éditeur pour son magnifique premier roman "Les Foudroyés" et qui, bientôt porté par un feu de brousse-à-oreille, s'est vu décerner le Prix Pulitzer 2010.

Un autre chef-d'oeuvre qui a fait son chemin par les sentiers de traverse, premier roman également,  "Chansons pour la fille du boucher" de Peter Manceau, fausse autobiographie à la gloire de la culture yiddish, écrite par le vrai fils d'une nonne et d'un curé. C'est le libraire de la bourgade de Cluny qui me l'a fourré dans les pattes d'autorité en me disant : vous devez le lire !

Je sais donc ce qu'il me reste à faire pour soigner ma Rentrée : aller me mettre à quatre pattes au fond de ma librairie parisienne, dans l'espoir de découvrir quelque perle rare cachée derrière les rayons du bas. J'y crois !

 

(septembre 2011)

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